Un marché des SCPI à deux vitesses en 2023-2024: soyez vigilants !
24 juillet 2023 par Benjamin CLAVEL
Après des années d’euphorie pendant lesquelles l’immense majorité des SCPI a délivré de belles performances, 2023 (et encore plus 2024) ouvre un nouvel épisode dans la vie de ces supports de « pierre papier ».
La remontée, brutale, des taux d’intérêt a en effet un impact majeur sur le marché de l’immobilier et on se dirige vers un marché des SCPI à deux vitesses. D’un coté des SCPI qui vont avoir des difficultés importantes (baisse du rendement / baisse du prix de part) et d’autres qui pourraient tout au contraire en profiter pour afficher des performances exceptionnelles.
Voyons ensemble quels critères surveiller pour faire les bons choix d’investissement, puis essayons de trouver quelles devraient être les gagnants et les perdants des années à venir (#BouleDeCristal).
Les indicateurs à surveiller:
Différents indicateurs peuvent nous donner des informations sur la santé de la SCPI à l’instant T et sur sa dynamique. Il est donc essentiel de les analyser si vous êtes un investisseur en SCPI.
La décote ou surcote du prix de part
La baisse de prix que l’on constate sur certains actifs immobiliers devrait se traduire par la baisse du prix de parts de plusieurs SCPI.
Or il existe une méthode très efficace pour essayer de prévoir l’évolution du prix de part d’une SCPI: le calcul de sa décote ou de sa surcote. Pour plus d’informations sur cette méthode, vous pouvez relire notre article dédié.
Pour faire simple nous comparons la valeur de reconstitution de chaque SCPI, c’est à dire le prix qu’il faudrait mettre pour recréer une SCPI identique (=la valeur d’expertise de chacun des immeubles qui la compose + les frais d’acquisition) à son prix de souscription. Ensuite, on peut découper les SCPI en trois catégories:
- Celles dont le prix de souscription est supérieur à la valeur de reconstitution >>> ces sont des SCPI « surcotées » et il faut donc se méfier.
- Celles dont le prix de souscription est aligné à leur valeur de reconstitution >>> ces sont des SCPI à leur « juste prix »
- Celles sont le prix de souscription est inférieur à la valeur de reconstitution >>> ce sont des SCPI « décotées », ce qui est évidemment très intéressant (même si ça n’est pas un critère d’achat suffisant)
La dynamique de collecte
Soyons clair sur un point: la SCPI n’est pas un produit liquide. C’est de l’immobilier. Et donc la liquidité n’est pas garantie.
D’ailleurs savez-vous comment est assurée la liquidité des parts d’une SCPI à capital variable ? (les choses sont différentes pour les SCPI à capital fixe, mais celles-ci étant devenus une exception nous ne attarderons pas sur le sujet)
Deux leviers peuvent être utilisés pour permettre à des investisseurs souhaitant vendre de récupérer leur capital:
La collecte :
La nouvelle collecte vient compenser les sorties: c’est le mode de sortie le plus classique. Si tel mois la SCPI « Super SCPI » reçoit des demandes de souscription (= achat) pour 1000 parts et des demandes de retrait (= ventes) pour 100 parts, alors les achats permettent de compenser les ventes, et le surplus de parts demandées est créé par augmentation du capital social de la SCPI. Les 100 parts à la vente sont donc vendues, et 900 parts nouvelles sont créées.
Le fonds de remboursement:
Si le nombre de parts en vente a été plus important que le nombre de parts achetées, alors se créé ce qu’on appelle une « liste d’attente« . Les parts restent en vente, jusqu’à ce que le nombre de parts achetées soit suffisant pour acheter les parts en attente. Ca peut arriver de manière temporaire, ce qui n’est pas gênant. Mais si la situation traine, c’est à dire si la liste de parts en attente de cession s’allonge, alors ça peut devenir problématique pour certaines personnes qui ont besoin de liquidités. Dans ce cas la société de gestion peut mettre en place un « fonds de remboursement« , c’est à dire qu’elle vend des immeubles pour dégager des liquidités et permettre à la SCPI d’acheter elle même les parts des associés qui ne veulent pas attendre et qui préfèrent vendre au fonds de remboursement (généralement avec une décote de l’ordre de 10 %).
Il faut donc surveiller la dynamique de collecte / decollecte d’une SCPI: une SCPI qui verrait sa collecte s’effondrer et / ou sa décollecte grimper en flèche pourrait se retrouver en situation d’illiquidité, peu confortable pour les investisseurs.
La dynamique de rendement
Plus que le rendement en tant que tel (même si on gardera en tête qu’un taux de rendement 2022 inférieur à 4,50 % est dessous de la moyenne du marché), c’est la dynamique qu’il faut surveiller. En effet, dans un marché immobilier sur lequel les acheteurs ont repris la main sur les vendeurs, les nouvelles acquisitions doivent servir des rendements moyens plus élevés que par le passé. De même, avec la forte inflation, les loyers des locataires déjà en place sont censés augmenter. Donc, on devrait voir le rendement servi par les SCPI (en Euros par part) augmenter en 2023 et en 2024.
Les SCPI pour lesquelles ça ne serait pas le cas seront probablement à éviter.
Les SCPI qui semblent en difficultés
Je ne vais pas pointer ici du doigt toutes les SCPI qui nous semblent mal en point, mais en voici quelques exemples illustratifs.
Patrimmo Commerce:
Patrimmo Commerce est une SCPI murs de magains gérée par Primonial REIM. Voici pourquoi j’estime qu’elle est en difficultés et qu’il est préférable d’en rester éloigné actuellement:
- Son prix de souscription est à 197 € contre une valeur de constitution de seulement 181,25 € au 31/12/2022, soit une surcoté conséquente de 8,7 %.
- La dynamique de collecte n’est pas du tout bonne puisque d’après le dernier bulletin trimestriel d’information disponible (T1 2023) plus de 92 000 parts sont en attente de retrait, alors que seulement 421 parts ont été souscrites… Autant dire que la liste d’attendre risque d’être longue !
- Le rendement n’est pas non plus très bon: 3,86% en 2022, soit assez nettement en dessous de la moyenne. A voir si ce rendement augmente ou pas en 2023 >>> ça n’est pas impossible car plus de 10 % du patrimoine n’est pas loué donc il y a des possibilités d’amélioration.
Génépierre
Genepierre est une SCPI diversifiée (70 % de bureaux, le solde en commerces, logistique, hotels, …) gérée par Amundi Immobilier. Elle parait elle aussi en difficultés:
- Le prix de souscription est surcoté de 8,76 % par rapport à la valeur de reconstitution >>> c’est ENORME !
- La dynamique de collecte / décollecte est inquiétante puisqu’au 31/12/2022 près de 25 000 parts étaient en attente de retrait. Le chiffre au 30/06/2023 n’est pas encore connu mais il a du augmenter car les souscriptions sont faibles (à peine plus de 4000 parts sur le T2 par exemple) et ne suffisent donc pas à compenser les nouvelles demandes de vente de parts.
- Le rendement est décevant: 3,82 % en 2022, donc très nettement en dessous de la moyenne du marché.
Les SCPI qui devraient cartonner:
Mon avis n’ayant pas changé depuis mon article d’avril dernier, je vous renvoie vers celui-ci:
Ce qu’il faut retenir
Un marché à deux vitesses, mais qui recèle encore de belles opportunités à condition d’être vigilant.
Il va falloir être vigilant et faire les bons choix. Peut-être faire du ménage si vous détenez un portefeuille de SCPI.
Si vous envisagez d’investir en immobilier, certaines afficheront des performances très attractives en 2023 / 2024 (des rendements supérieurs à 6 ou 7 % sont possibles, et même des augmentations de prix de part).
Avertissements:
- Les supports présentés comportent un risque de perte en capital.
- Les performances passées ne présagent pas des performances futures.
- Contactez nos conseillers préalablement à tout investissement. Nos conseils ne sont pas facturés, alors pourquoi prendre le risque de faire une erreur seul plutôt que de vous appuyer sur un expert ?
Cet article ne constitue pas une recommandation d’investissement personnalisée. Nous vous invitons à vous rapprocher de nos conseillers afin de vous assurer que cette solution est adaptée à votre situation et à votre profil d’investisseur. Une SCPI est un produit de placement collectif investi en immobilier. Compte tenu de sa nature, il est exposé à différents risques (détaillés notamment dans la « note d’information »). La durée d’investissement minimale recommandée est de 10 ans. Sa performance est susceptible de varier en fonction des cycles immobiliers.